Machine à faire les maillons de chaîne en tôle brasée

Cette petite machine présentée dans l’exposition Marcel Duchamp. La peinture, même du Centre Pompidou jusqu’au 5 janvier 2015 fait partie des multiples constructions d’un mécanicien parisien inventif mais tombé dans l’oubli, Antoine Dominique Sisco.
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collections machine maillons chaîne
Machine à faire les maillons de chaîne en tôle brasée avec sa tige en acier et sa manivelle, 1845-1866, Inv.07423 © Musée des arts et métiers-Cnam/photo Charlotte Compan
À l’Exposition des produits de l’industrie, en 1849, Antoine Dominique Sisco présentait pêle-mêle « des bouchons, des lavoirs à l’usage de la troupe, des chaussures en cuir » et des « chaines destinées à la marine ». C’est plus particulièrement ce dernier point qui nous intéresse ici. Sisco avait en effet constaté que les maillons employés pour maintenir les ancres des navires pouvaient se rompre si la soudure exécutée pour clore chaque boucle était de qualité insuffisante. Pour contourner cette difficulté, Sisco a cherché à former les maillons par l’enroulement de bandelettes ou de fil de fer grâce à cette machine. L’engrenage supérieur, animé par une manivelle, commande l’engrenage inférieur relié à une pièce en forme de losange arrondi autour de laquelle viendront s’enrouler les bandes de fer. Une fois les maillons constitués, on assemble entre elles les différentes parties métalliques par brasage (en les chauffant et en les martelant).

Sisco put ainsi produire des chaînes réputées pour leur résistance et pour leur légèreté, très régulièrement primées lors des expositions universelles. Mais l’augmentation du tonnage des navires dans la seconde moitié du XIXe siècle a rapidement imposé l’utilisation de chaînes encore plus solides, et le principe mis au point par Sisco, directement concurrencé par les progrès de l’industrie métallurgique, a montré ses limites. Cela étant, la machine conservée au Musée des arts et métiers, achetée en 1866 par l’institution, demeure un témoignage intéressant d’une technologie rapidement dépassée. Avec ses roues dentées, elle est représentative d’une certaine forme d’esthétisme qui a fasciné de nombreux artistes, au premier rang desquels figure le peintre Marcel Duchamp. Ce dernier a régulièrement fait le lien entre les corps en mouvement et la mécanique. Duchamp fréquentait assidument les galeries du Musée des arts et métiers, s’attardant sur les formes des outils, mécanismes et moteurs à gaz et à vapeur qui y étaient présentées.

C’est donc à l’occasion d’une grande rétrospective que le Centre Georges Pompidou consacre à Marcel Duchamp que vous pourrez y découvrir cette machine, prêtée par le Musée des arts et métiers avec plusieurs autres pièces issues des collections (un châssis pour l’étude de la perspective, inv. 01821, des modèles mathématiques en papier, inv. 08804 à 08806, deux petits modèles de machines à vapeur, inv. 11409 et 12097, une radiographie d’une main, inv. 13059-0029 et une machine à dessiner dite « vitre italienne », inv. 13674).

Marcel Duchamp. La peinture, même
Centre Georges Pompidou
24 septembre 2014 – 5 janvier 2015