Cette superbe pendule est un témoignage de premier plan sur l’histoire de l’horlogerie et des arts décoratifs en France à la toute fin du règne de Louis XIV. Son dessin est peut-être l’œuvre de Gilles Marie Oppenord (1672-1742), architecte et décorateur français, élève de Jules Hardouin-Mansart, qui participa notamment à la décoration du Palais-Royal et fut l’un des promoteurs du style « rocaille ». La pendule à proprement parler représente les figures d’Hercule et d’Atlas supportant un globe surmonté d’une victoire. Comprenant un fond bleu semé d’étoiles et d’un Soleil stylisé, le globe renferme un cadran annulaire portant les chiffres permettant de lire l’heure. C’est ce cadran horizontal qui est entraîné par le mouvement d’horlogerie et qui matérialise l’écoulement du temps.
On doit à Jacques Thuret (1699-1738), horloger du roi, l’exécution du mécanisme de la pendule, et on attribue à l’ébéniste André Charles Boulle (1642-1732) la réalisation de la gaine, marquetée d’ébène, d’écaille et de bronze ciselé et doré. Le piédestal contenait à l’origine un baromètre dont il ne reste, aujourd’hui, que le cadran.
Le plastron du lion situé au sommet de la gaine porte la signature THURET / A PARIS / 1712. La pendule appartenait sans doute à Claude Le Bas de Montargis (1659-1731), magistrat et membre de la noblesse de robe, receveur des Consignations des Requêtes du Palais (1698), puis trésorier général de l’Extraordinaire des guerres (1701), garde du Trésor royal (1708) et enfin secrétaire des Ordres du roi et Conseiller d’État (1722). Il avait épousé Catherine Henriette Hardouin-Mansart (1673-1748), devenant ainsi le gendre de l’architecte Hardouin-Mansart. Les Le Bas de Montargis possédaient place Louis-le-Grand (aujourd’hui place Vendôme) un hôtel dans lequel fut inventoriée pour 300 livres « une grande pendule sur sa gaine d’ébène et marqueterie en forme triangulaire orné [sic] de ses bronze dorés d’or moulu surmonté [sic] d’un globe marquant les heures, cours de la lune et des mois faitte à Paris par Thuret dans laquelle gaine est représenté en termometre. »
Entrée dans les collections du Conservatoire des arts et métiers entre 1818 et 1841, la pendule d’Hercule et Atlas est considérée comme un chef d’œuvre d’ébénisterie des premières années du XVIIIe siècle. De récentes études se sont interrogées sur l’attribution, autrefois systématique, de cette horloge et de sa gaine à l’atelier d’André Charles Boulle, et proposent l’hypothèse d’une collaboration étroite entre Oppenord et le célèbre ébéniste. Notons d’ailleurs que les ateliers de Thuret, Boulle et Oppenord, artisans au service des Bâtiments du roi, étaient tous trois installés dans les galeries du palais du Louvre.
Les boiseries d’un cabinet de l’hôtel Le Bas de Montargis, entrées en 1898 dans les collections du musée du Louvre, ont été restaurées et remontées dans un parcours dédié aux arts décoratifs du XVIIIe siècle. Le Musée des arts et métiers prête, pour une durée d’un an, la pendule d’Hercule et Altas, qui retrouvera ainsi plusieurs pièces de décor et de mobilier contemporaines permettant d’apprécier le contexte de sa création.