
Fil d'Ariane
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- Ça bouge dans le théâtre des automates
Ils nous fascinent, nous effraient ou nous projettent dans un monde au parfum de fête foraine… Dans tous les cas, les automates ne nous laissent pas indifférents. Est-ce l’éclat intact de leurs regards ? Le geste suspendu pour ne pas attirer l’attention des mortels ? Ou encore le reflet éternel de notre humanité ?
Une dizaine d’automates viennent de prendre place dans le théâtre qui leur est dédié. Ils remplacent leurs frères mécaniques, qui, eux, ont rejoint les réserves du musée où ils profitent d’un climat tempéré et d’une obscurité idéale pour se régénérer.
Dans cette nouvelle présentation, une belle place est faite aux automates de la ville de Neuilly-sur-Seine, en dépôt au musée des Arts et Métiers. Ce renouvellement illustre l’incroyable diversité des thèmes portés par ce petit peuple mouvant. Dès la seconde moitié du XIXe siècle, les fabricants d’automates, observateurs attentifs de leur époque multiplient leurs sources d’inspiration. Clowns facétieux, magiciens mystérieux, Pierrot lunaires, danseurs intrépides… témoignent d’une incroyable inventivité.
Les constructeurs d’automates ne manquaient pas d’imagination, pouvez-vous nous donner quelques exemples des nouveautés que les visiteurs pourront découvrir ?
Deux automates fabriqués par Gaston Decamps au début du XXe siècle sont des témoins précieux, révélateurs de l’observation fine de l’époque. Little Tich, avant d’être ce petit bonhomme mécanique de 50 cm de haut était un célèbre clown anglais (Harry Relph), connu pour sa petite taille égale à celle de ses chaussures, qu’il faisait claquer sur un rythme endiablé. La charmeuse de serpent tellement parfaite nous entraine dans l’antre des Folies Bergère, où la véritable danseuse était nue. Madame Decamps, mère du jeune Gaston exigera qu’une robe couvre la trop voluptueuse créature.
Un automate illustre une tout autre source d’inspiration, voire de préoccupation. L’Ange musicien aux ailes déployées remplit deux missions, il joue de la harpe avec une élégance folle et fait la quête avec une patience infinie. Autrefois, on trouvait ces automates angéliques à l’entrée de certaines églises. Ils étaient pourvus d’un monnayeur et l’introduction d’une pièce déclenchait le mécanisme. Ainsi l’ange remerciait le donateur d’un battement d’ailes et d’un gracieux mouvement de la tête. Une musique céleste s’échappait du socle (Il est né le divin Enfant).
La fabrication de ces étonnantes machines requiert le savoir-faire d’artisans de précision, quelle est la « mécanique » qui se cache derrière les somptueuses toilettes ?
Une vitrine illustre la production en série de petits automates à têtes de porcelaine qui se développe au XIXe siècle. Ces gracieuses petites figurines aux airs de poupées sont toujours vêtues de somptueuses toilettes et dotées d’accessoires variés. Cet artisanat de précision faisait travailler plusieurs intervenants : mécaniciens, horlogers, fabricants de poupées, couturiers. Le Marquis au visage poupin, fume avec grâce un cigare imaginaire. Loin du monde des clowns et escamoteurs farceurs qui égaillent les salons bourgeois, il demeure indifférent dans ses fastueux habits de soie, de perles et de dentelles.
L’introduction fin XIXe, des moteurs électriques pour animer les automates règle le problème du remontage fréquent des ressorts moteurs. Cette évolution des techniques est illustrée par un petit héros de 70 cm : L’Hercule électrique. Ce « rouleur de mécaniques », qui soulève son haltère tellement sérieusement, est un jalon important dans la famille. C’est l’un des tout premiers automates à être pourvu d’un moteur électrique. C’est au cours de l’exposition universelle de 1900 que le public le découvrira. L’absence de vêtements, perdus au fil du temps permet d’apprécier le mécanisme et le cartonnage.
Les automates ne sont pas des jouets, parmi les pièces présentées, deux avaient un usage très particulier !
La collection d’automates du musée est également un miroir de l’évolution de la vie française et de son économie. C’est précisément l’évolution de cette dernière qui conduit les fabricants d’automates au début du XXe siècle à se diversifier et notamment à réaliser des automates publicitaires. Les grands magasins utilisent cette joyeuse propagande mouvante, à la période des fêtes, pour animer les vitrines et attirer le chaland. Puis les automates seront porteurs de messages spécifiques et assureront le succès d’un produit ou d’une enseigne. L’escamoteur devait animer une vitrine de parfumeur. Il cache de petits flacons de parfum qui changent à chaque manipulation du gobelet. Le modèle était commandé sur catalogue et libre à l’acheteur de choisir le produit escamotable. À côté la Soubrette Vitoxy agite frénétiquement son pulvérisateur pour tuer mouches, moustiques et autres puces et punaises. Cet automate était installé à l’arrière d’un camion de la société éponyme, ainsi aucun Parisien ne pouvait ignorer les bienfaits de ce produit.